Une intensification de la circulation, à la fin du siècle dernier, rend insuffisante l'actuelle passerelle avec sa chaussée large de seulement 5,5 mètres. La municipalité décide alors de construire un deuxième pont au-dessus de la vallée de la Pétrusse. Plusieurs projets sont présentés. La plupart des propositions, que ce soit pour un pont en pierre ou en métal, avancent un pont à arches. Etant donné que cette initiative prévoit également le tracé d'une voie ferrée pour la ligne vicinale reliant la ville à Echternach, les députés de la région d'Echternach encourageront résolument la construction du pont Adolphe.
Ce sera l'ingénieur en chef Albert Rodange (1858-1927), fils du poète Michel Rodange, qui sera finalement chargé des plans pour ce nouveau pont dont le tracé actuel est déjà déterminé à ce moment-là, alors qu'initialement il devait être construit dans la prolongation de la rue Philippe.
Le pont Adolphe en construction (1901) |
Le projet de Rodange prévoit un pont avec une grande arche centrale d'une portée de 76,88 mètres. S'y ajoutent trois arches, du côté de la gare, et cinq autres, légèrement cambrées, donnant sur la ville. Les petites arches ont, chacune, une portée de 10 mètres. Quant aux matériaux, Rodange prévoit de recourir à une combinaison de béton et de ciment, deux matières qui, malheureusement ne présentent pas les mêmes caractéristiques de dilatation. Pour mettre à l'épreuve cette technique, Rodange construit, en 1895, un pont semblable au-dessus de la Sûre, près du Moulin de Bourscheid. L'arche de ce pont que les troupes allemandes en fuite feront sauter en 1945 n'a cependant qu'une portée de 38 mètres.
Rodange songe même à inclure dans son projet une galerie pour recueillir les eaux usées ainsi que les conduites de gaz et d'électricité. Malgré son architecture simple, le pont semble imposant dans son tracé. Face à une telle audace, le gouvernement recourt à l'avis d'un expert étranger, à savoir Paul Séjourné, un ancien ingénieur en chef des Ponts et Chaussées de Dijon. Séjourné, à l'époque ingénieur en chef du service du bâtiment des chemins de fer PLM est le plus célèbre constructeur de ponts. La plus grande arche qu'il ait construit n'a cependant que 61,6 mètres de portée. Mais il a redécouvert une vieille technique développée par les Romains et qu'il voudrait exploiter dans la construction du nouveau pont. Il suggère d'ériger la grande arche se composant de différentes couches de pierre au-dessus d'un cintre de bétonnage en bois. Son projet prévoit également deux arches individuelles de 5,25 mètres, séparées de 6 mètres l'une de l'autre, et qui, une fois achevées seront reliées par une plaque en béton armé. Le résultat en est une route praticable d'une largeur de 16 mètres.
C'est en 1900, le 14 juillet plus exactement, que le Grand-Duc Adolphe pose la première pierre du nouveau pont. Les frères Fougerolles de Paris, chargés de l'oeuvre, commencent les travaux préliminaires en automne de la même année. Les travaux se trouvent sous la direction d'Albert Rodange et du chef de chantier Victor Fonck. Le 23 juillet 1901, la première arche en pierre, commencée en mai (!), est terminée, et, le 26 octobre, le cintre de charpente peut être démonté, A la fin de la construction de la deuxième arche, les deux arches seront reliées par un revêtement de chaussée en béton. Le 24 juillet 1903, le pont est ouvert à la circulation. Avec ses dimensions gigantesques (grande arche d'une portée de 84,65 mètres, hauteur du socle jusqu'à la clé de voûte de 16,2 mètres, rayon de l'arche elliptique de 1,44 mètres, force de la voûte au-dessus de la maçonnerie à socle de 2,16 mètres, force de la voûte sur les fondements de 9 mètres) le pont Adolphe restera pendant longtemps le plus grand pont en pierre du monde.
Ce n'est que le 19 avril 1904 que le nouveau pont ainsi que la ligne de train vicinal Luxembourg-Echternach, la Charly-Strecke, tirant son nom de Charles Rischard, ancien Directeur général desTravaux publics, seront inaugurés officiellement, en présence du ministre d'Etat Paul Eyschen, du Directeur général Charles Rischard, de l'évêque Monseigneur Koppes, du maire de la ville Mousel, du maire de Hollerich Steffen et de nombreux ministres.