Conformément à l'article 9 de la Charte de Venise, la restauration du réduit du fort Thüngen est précédée et accompagnée d'une étude archéologique et historique. Ainsi, avant le début des travaux de construction du musée de la forteresse des fouilles archéologiques, entreprises à l'intérieur et dans le fossé du réduit ont permis de retrouver des restes qui remontent aux différentes époques historiques du fort Thüngen.
L'époque d'avant Vauban (jusque 1684)
Les hauteurs du Grünewald ne faisaient pas partie du système défensif de la forteresse de Luxembourg jusqu'au 17ième siècle. Peu de temps avant l'ouverture de la tranchée, qui marqua le début de l'attaque de la forteresse en 1684 par Vauban, les Espagnols avaient établi de petits ouvrages en terre sur la hauteur au-dessus de l'église du Pfaffenthal, afin d'empêcher l'attaquant français d'y positionner ses batteries de canons.
Après avoir chassé les défenseurs espagnols des hauteurs du Grünewald, Vauban y installa de fortes batteries qui allaient flanquer les attaques dirigées contre la redoute et la contre-garde Berlaymont.
L'époque de Vauban 1684-1697)
Après la prise de Luxembourg, Vauban disposa sur les hauteurs du Haut-Grünewald un ouvrage à cornes et sur le Bas-Grünewald un ouvrage à couronne solidement maçonné. Afin de garantir une bonne visibilité et un bon contrôle au-devant des glacis de ces deux éléments, Vauban fit construire deux structures non-voûtes, les redoutes du Pfaffenthal et du Parc à une bonne centaine de mètres devant les ouvrages du Grünewald. Il s'agit de tours d'observation de plan carré ayant 10 mètres de côté et qui étaient protégées par un simple chemin couvert et un glacis.
Sur le terre-plain de l'enveloppe du Fort Thüngen ont subsisté encore quelques rangées de maçonnerie de la redoute "du Parc". Malheureusement ces restes sont disparus pour faire place au MAM.
Les travaux de fouilles ont permis de retrouver quelques restes des murs intérieurs des casemates du Réduit ainsi que la fondation de deux piliers centraux dans les tourelles.
Le réseau des contre-mines de l'ensemble du fort date de l'époque autrichienne et est encore dans un très bon état de conservation. Le four à mine situé du côté droit arrière du réduit a été ouvert et est accessible au public.
L'époque autrichienne (1713-1795)
En 1732-33. les ingénieurs militaires autour du général de Beauffe, qui avait promis en 1730 de "pousser à la perfection les ouvrages en forme de flèches", décidèrent de renforcer e.a. le front du Grünewald en y construisant deux nouveaux forts extérieurs, dont le Fort Thüngen.
La vue en plan du Fort Thüngen se base sur la forme du bastion à deux faces et à flancs retirés. Le Fort Thüngen recevait une puissante enveloppe avec fossé extérieur et deux lunettes qui flanquaient le chemin couvert et commandaient le glacis extérieur. Le réduit fut équipé d'une galerie souterraine qui pouvait abriter 10 canons sous casemate.
L'accès vers l'intérieur se trouvait au milieu de la gorge du réduit et était protégé par deux tourelles latérales. Un pont dormant en bois avec pont-levis permettait le passage du fossé. Le niveau du sas d'entrée se trouvait à quelques marches au-dessus du niveau de la galerie d'accès au systhème des contre-mines. A droite et à gauche de la porte d'entrée partait par un escalier le circuit des casemates qui faisait le tour complet du réduit en longeant ses murs extérieurs. A côté des embrasures à fusils les constructeurs avaient prévu dix casemates à canons.
Les dessus du réduit ne permettaient pas de mise en batterie de pièces d'artillerie. Aussi la hauteur extérieure de l'ouvrage autrichien était beaucoup plus faible que celle que nous connaissons aujourd'hui.
L'époque prussienne (1815-1867)
Pendant les années 1836/37, le réduit du Fort fut transformé de manière assez radicale. Les clefs de voûte dans les coupoles inférieure et supérieure de la tourelle gauche montrent les noms des ingénieurs militaires Frölich (1837), Meyer et Schrader (1836).
Dans leur nouveau projet, les ingénieurs prussiens n'ont gardé que la forme initiale du réduit ainsi que le système des mines de destruction dans le sous-sol. Afin d'avoir la pente nécessaire au fonctionnement de la canalisation des eaux de pluie, qui était reliée à une grande citerne de 350 m2 aménagée dans le fossé à côté de la tourelle droite, le niveau de la galerie centrale a dû être modifié. La voûte de cette galerie a été par la même occasion rabaissée afin de permettre la réalisation des grandes salles casematées au rez-de-chaussée. L'ensemble de la construction a été rendue à l'épreuve de la bombe grâce à une couche de terre de plusieurs mètres d'épaisseur.
Une couche d'argile en guise d'isolation recouvrait les voûtes maçonnées et drainait les eaux d'infiltration vers des entonnoirs en fonte qui couronnaient les descentes d'eau verticales. Afin de faciliter leur entretien, ces saignées étaient fermées par une maçonnerie en briques rouges.
Le relevé photogrammétrique combiné à une observation des maçonneries extérieures a permis d'identifier et de situer exactement les restes de maçonneries autrichiennes ainsi que les modifications et adjonctions prussiennes.
L'ensemble du Fort était dominé par les trois tourelles marquées par la clef de voûte en forme de glands et qui ont donné le nom populaire au Fort.
Les travaux de nettoyage du réduit ont enfin permis de retrouver le soubassement de la grue qui servait à lever les canons sur les dessus du réduit. Après les travaux de modernisation des prussiens, il a été en effet possible de mettre en batterie au mois trois canons sur des plates-formes spécialement prévues pour cette fonction.